Il est né le 7 mai 1934 à Tlemcen. Son père est un employé de mairie. Il fait des études primaires puis secondaires à Tlemcen, Alger et Oujda, puis de nouveau à Tlemcen (à la Médersa). Il prend un premier contact avec le FLN* en septembre 1955, en participant à une réunion clandestine à Tlemcen.
Mais en fait, c’est sans contact particulier qu’il rejoint le maquis dans les monts de Tlemcen fin octobre 1955. Benali Dghine est affecté en Zone 1 sous les ordres du capitaine Jabeur*, dont il devient le secrétaire. En avril 1956, il est envoyé à Tlemcen et placé sous les ordres de lieutenant Mokhtar Bouzidi, dit Ogb El Lil (l’Aigle de la Nuit), avec pour mission d’y organiser les cellules clandestines dans la ville. Il met en place le commando « Brahim ». Il se distingue en organisant et en participant à au moins trois opérations d’envergure à Tlemcen en 1956 : l’attaque de la caserne de l’ex-MTO ; la fausse patrouille de la police militaire qui s’est attaquée au mess des sousofficiers* le 6 mai ; et en dehors de la ville, l’attaque de fermes de gros colons* le 7 mai.
Sa carrière politico-militaire est lancée. Il a 22 ans. À la mi-mai 1956, suite à un incident avec Mokhtar Bouzidi, Benali Dghine rejoint Oujda. Boussouf* lui confie une mission de pénétration et d’organisation de l’ALN*, depuis les villes d’El Bayadh et Mecheria jusqu’à Béchar et plus au sud (ouest et est). Sa mission est triple, comme l’explique Dahou Ould Kablia : une mission politique de prise en charge des populations et notamment celles soumises à la pression des bellounistes dans la région de Djelfa-Aflou-Laghouat ; une mission militaire assurée par des compagnies (katibate) avec des objectifs précis et une mission organique avec la création de la Zone 8 et ses quatre régions. Boussouf, devenu colonel commandant de la Wilaya 5* après le congrès de la Soummam*, nomme Benali Dghine (Brahim) capitaine, chef de la Zone 8/Béchar. En moins d’un an, il réussit à rallier des responsables messalistes, à créer la Zone 9 de la Wilaya 5, il ouvre le front sud de Timimoun à Tindouf avec le soutien des tribus nomades et organise la désertion des méharistes. Le capitaine Brahim est promu commandant fin juillet 1957 à la suite de la mort au combat du commandant Sayah Miloud (El Hansali). Il rejoint à Oujda le commandant Boumediene*. Au cours de la réunion des chefs de zone de la Wilaya 5 en octobre 1957, présidée par Boussouf, il y retrouve son ancien responsable, le capitaine Jaber, et son successeur à la tête de la Zone 8, Kaïd Ahmed (capitaine Slimane).
Mais il apprend surtout que Boumediene est nommé colonel, commandant de la Wilaya 5, Boussouf ayant été nommé membre du nouveau CCE* lors la réunion du CNRA* au Caire le 20 août 1957. Dans sa nouvelle fonction au Commandement général de la wilaya d’Oran, sa préoccupation principale est l’acquisition d’armes pour les maquis. Fin janvier 1958, le commandant Lotfi se rend en Espagne où il est arrêté et incarcéré. À sa libération, il apprend sa nomination en qualité de chef de la Wilaya 5 et est promu au grade de colonel. Il installe son QG à Bouarfa dans le Sud marocain. De droit, il devient membre du CNRA. Le président Ferhat Abbas* ne tarit pas d’éloges à son sujet dans Autopsie d’une guerre (1979) en relevant ses idées généreuses et respectueuses des droits de l’homme. Il condamne la « bleuïte* » et refuse de participer à la réunion interwilayas contre le GPRA* organisée par le colonel Amirouche* (6-12 décembre 1958).
Il condamne l’assassinat du maire* de Thiers près de Mascara dans une interview accordée à El Moudjahid (mai 1959). Il exprime son espoir que les Européens rejoindront la nouvelle Algérie indépendante et répète que la communauté juive est chez elle. Il lui est attribué une étude socio-économique sur l’Algérie rédigée en 1958. À son retour de Yougoslavie* (juin 1959), il participe à la réunion des dix colonels* (10 juillet-16 décembre 1959) qui a pour objet de trouver des solutions à la crise éclatée entre le GPRA et certaines wilayas. Cette rencontre est suivie du congrès de Tripoli (16 décembre 1959-18 janvier 1960), du renouvellement du CNRA et du GPRA, mais surtout de la mise en place d’un État-major général* (EMG) confié au colonel Boumediene. Il retourne dans sa wilaya pour gérer l’affaire Zoubir* (automne 1959).
Il prend la décision de rejoindre le territoire national accompagné de son adjoint le commandant Mohamed Laouadj (dit Farradj puis M’barek). Le 27 mars 1960, la petite troupe qu’il commandait est interceptée par un détachement de l’armée française. Il meurt les armes à la main.
Fouad SOUFI
Bibl : « Dahou Ould Kablia parle du colonel Lotfi », Le Quotidien d’Oran, 2006 • Mohamed Lemkami, Les Hommes de l’ombre. Mémoires d’un officier du MALG, Alger, Anep, 2004 • Chakib Mesbah, « Itinéraire du colonel Lotfi », Centenaire de la Medersa de Tlemcen, 1905-2005, Tlemcen, Ecolymet, 2005