Entretiens de Confucius

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Entretiens [Confucius]

Entretiens [Confucius] (en chinois, Lunyu), ouvrage d’aphorismes et de dialogues rassemblés par les disciples de Confucius, dont la première version date probablement de plusieurs dizaines d’années après sa mort (479 av. J.-C.), au iiie siècle av. J.-C.

L’HISTOIRE ET LA FORME DES ENTRETIENS

Les Entretiens sont une compilation de textes qui ne datent pas tous de la même époque et ne sont pas tous de la même main. Condamné à l’autodafé par le fondateur de la dynastie Qin, Shi Huangdi, en 213 av. J.-C., le texte est cependant sauvé : il en subsiste différentes versions, dont une synthèse en vingt livres réalisée au iiie siècle apr. J.-C.

Parmi cet ensemble hétéroclite, les neuf premiers livres sont traditionnellement considérés comme les plus anciens, écrits par des disciples directs de Confucius ou plus vraisemblablement par des disciples de la deuxième génération. Quant aux onze autres livres, ils sont manifestement plus tardifs, les cinq derniers datant même du début du iie siècle apr. J.-C.

Les Entretiens se présentent comme une suite de courts dialogues et d’aphorismes écrits dans la langue des lettrés de la principauté de Lu, et dont l’unité est assurée par la présence continue du maître et de ses principaux disciples, qui forment une étonnante galerie de portraits : Zigong, Ran Qiu, Zilu, Yan Hui et les autres s’entretiennent en toute simplicité avec leur maître, qui répond avec bienveillance et sagesse à leurs questions.

L’ENSEIGNEMENT DE CONFUCIUS RÉVÉLÉ PAR LES ENTRETIENS

Certains fragments des Entretiens forment cependant d’assez longs dialogues, qui permettent de dresser le portrait d’un homme sensible, bon, simple et modeste, amateur de musique, qui place tous ses espoirs et toute sa confiance en l’être humain, et qui évoque parfois ses propres doutes et ses souffrances. Les Entretiens permettent ainsi de nuancer et d’humaniser les biographies officielles de Confucius, et sans doute de mieux comprendre son enseignement.

Le discours moral des Entretiens

La pensée du vieux maître y apparaît d’emblée comme pratique. Confucius ne prétend rien révéler, pas plus qu’il ne construit un système de pensée : il prône, avant tout, la valeur de l’expérience et l’importance de l’éducation. Conscient de la fragmentation du pouvoir central et inquiet de la décadence politique qui en découle, il reprend à son compte la théorie du « mandat céleste », selon laquelle le souverain reçoit du ciel un mandat qui rend son gouvernement légitime, mais le perd lorsqu’il ne se conforme plus à l’ordre des choses.

Illustrant son propos d’exemples tirés de la mythologie chinoise, Confucius n’en appelle pas à la révolution ; il ne prône, contre tous les maux qui affectent son époque, qu’un seul remède : le retour à la morale. Si le souverain est bon, s’il gouverne selon la morale, alors toutes les lois deviennent inutiles, le peuple lui-même devient bon, et l’Univers tout entier est conforme à l’ordre des choses. L’homme « commun » quant à lui, s’il se montre bon fils, bon père et bon sujet, participe à sa façon de l’harmonie du monde, et apporte sa pierre à la stabilité du gouvernement.

L’humanisme de Confucius : éducation et vertus morales

Confucius manifeste ainsi sa foi en l’Homme, ou plutôt en chaque homme. Sa pensée éducative, généreuse et idéaliste, découle tout naturellement de cette immense confiance : l’enseignement doit s’adresser à tous sans exception, et surtout refuser l’instrumentalisation de l’Homme pour n’avoir pour seul idéal que la formation de « l’homme de bien » (junzi).

La morale de cet « homme de bien » telle que la prône Confucius est avant tout relationnelle. Elle a pour horizon la vertu d’humanité (ren) qui impose de considérer autrui comme un autre soi-même. Ren est une vertu infiniment rare qui suppose la mise en pratique d’autres vertus morales : xiao (piété filiale), xin (fidélité à la parole donnée, sincérité), zhong (droiture et loyauté envers soi-même), shu (droiture et loyauté envers les autres), zhi (sagesse, discernement), yong (courage de faire ce qui est juste), etc.

Pour Confucius, cette morale complexe et exigeante se développe notamment au travers du respect des rites (ri). Parce que le rite est immuable et s’oppose ainsi à la loi (qui, elle, est arbitraire et s’inscrit dans une époque), il invite non pas à l’hypocrisie mais bien à la morale.

L’influence des Entretiens

Essentiellement constitués de paroles décontextualisées, les Entretiens ont fait le bonheur des « commentateurs » et autres exégètes de toutes les époques et de toutes les écoles philosophiques. Les philosophes chinois des époques suivantes ont notamment su y trouver la caution d’une pensée bien plus dogmatique que celle prônée par Confucius, et ont fait des Entretiens la « Bible » de l’idéologie confucianiste officielle (voir confucianisme), mise au service de la stabilité du gouvernement.

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