Taha Hussein

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Taha Hussein

Sociologue, professeur d’université et surtout écrivain, Taha Hussein, aveugle à l’âge de trois ans suite à une ophtalmie mal soignée, a marqué le monde des lettres arabes, d’abord dans son pays, l’Egypte, puis dans le Proche-Orient et le Maghreb. Lors de son séjour en France, il soutient en 1915 une thèse intitulée « Etude analytique et critique de la philosophie sociale d’Ibn Khaldun » (Paris, 1917). De retour dans son pays, il est chargé d’enseignement de littérature arabe à l’Université du Caire à partir de 1925. Mais la lecture qu’il donne de la poésie antéislamique dans un ouvrage éponyme (Fi al-Shi’r al-jahili), le rend scandaleux aux yeux de ses adversaires.

Voici comment il expose lui-même ce « procès en hérésie littéraire » qui fut monté contre lui : « J’ai donc été amené à rejeter pour une large part cette poésie fabriquée, selon moi, après coup, au IIe siècle [de l’Hégire], pour des raisons diverses. Chemin faisant, je mis en doute certaines croyances qui, sans toucher à la religion, se trouvaient tout de même mentionnées dans le Coran et dans les Traditions du Prophète… » (« Tendances religieuses… », p. 238). Autrement dit, en montrant que la poésie antéislamique était pour une large part une construction postérieure à la naissance de l’islam, il mettait en cause la validité du Coran comme témoignage historique, puisque le Texte sacré fait référence à des croyances qu’on ne connaît par ailleurs qu’à travers cette poésie. Cette cabale haineuse et violente l’amène à être suspendu d’enseignement de 1932 à 1934 ; pourtant, grâce à quelques soutiens décisifs, dont celui d’Ali al-Shamey Pacha, alors ministre de l’Instruction publique qui « prend fait et cause pour la liberté de pensée », il est réhabilité. Il prend la direction du département des lettres en 1935, devient ministre de l’Instruction publique de 1950 à 1952 et, enfin, directeur du département culturel de la Ligue arabe en 1955. Son souci constant aura été aussi d’« égyptianiser la langue arabe », pour reprendre le mot de Paul Khoury, lui le polyglotte, tandis qu’André Gide disait de l’un de ses livres, Le Livre des jours (AlAyyam), qu’il était « une patiente victoire de la lumière sur les ténèbres ». « Tendances religieuses de la littérature égyptienne d’aujourd’hui » in Cahiers du Sud, Marseille, 1947, p. 235-241 ; Le Livre des jours/La traversée intérieure, Paris, Gallimard, 1947 ; La Grande épreuve. ’Uthman, Paris, Vrin, 1974 ; Dans la prison d’Aboul-Ala (Ma’a ’abi l-’ala’ fî sijnihi), Villepreux, Editions Milelli, 2009 ; Adib ou l’aventure occidentale, Clancier-Guénaud, 1988. KHOURI, 1985.

Malek Chebel

Dictionnaire des réformateurs musulmans des origines à nos jours.

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