L'effritement de l'Empire

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L’effritement de l’Empire

Corruption et «intégrisme»

Aux XVIIe-XVIIIe siècles, l’apogée fait progressivement place au déclin. Autant les dix premiers sultans avaient fait preuve de compétence, autant leurs successeurs se désintéressent de la conduite des affaires pour s’enfermer dans le sérail. L’appareil gouvernemental est peu à peu paralysé par la corruption grandissante de ses membres et miné par les complots répétés de reines mères (valide). L’administration et la hiérarchie religieuse et judiciaire sont touchées à leur tour. La pratique grandissante du népotisme favorise la formation de «féodalités» agissantes et jalouses de leurs prérogatives. Les provinces, peu ou mal gouvernées, se désolidarisent progressivement de l’Empire, à un moment où l’armée, liguée avec les ulémas, cesse d’être un appui sûr. En outre, un «intégrisme» musulman, né sous l’influence de l’école sunnite des hanbalites, divise peu à peu les différents sujets de l’Empire et ajoute à ses difficultés.

Des frontières menacées

Cet état de crise se double de difficultés financières – apparues à la fin du règne de Soliman –, dont l’évolution va précipiter la mainmise de l’Occident sur l’économie ottomane. Militairement, l’Empire commence à décliner au moment où ses ennemis redoublent d’agressivité; l’Occident, psychologiquement libéré par sa récente victoire de Lépante, devient plus entreprenant. C’est ainsi que don Juan d’Autriche attaque et occupe pendant dix mois la ville de Tunis et que les impériaux remportent quelques succès en Hongrie. En 1603-1604, profitant de ces premières faiblesses, les Séfévides attaquent à leur tour et reprennent la Géorgie et l’Azerbaïdjan. Ces revers, bien que sans graves conséquences, ébranlent la confiance ottomane, et l’Empire va multiplier les concessions; la première consiste en la rétrocession de la Hongrie, de la Transylvanie, de la Podolie et de l’Ukraine (traité de 1699). Au XVIIIe siècle, d’autres traités, tout aussi défavorables (1718, 1768-1774, 1792), profitent à nouveau aux Autrichiens et aux Russes, ces derniers obtenant de surcroît l’accès à la mer Noire et le franchissement des détroits par leur flotte de commerce. Les puissances européennes occidentales – France, Angleterre, Hollande – agissent quant à elles par le biais de l’économie; elles inondent l’Empire de leurs produits manufacturés et le vident de ses matières premières.

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