D’où viennent les Algériens ?

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Si l’on s’en tient au discours officiel, les Algériens sont des Arabes et l’Algérie fait partie intégrante du monde arabe ou, dans un sens plus large, du vaste ensemble arabo-musulman. Cette définition mérite d’être nuancée dans la mesure où elle est surtout fondée sur des considérations politiques inspirées par les luttes anticoloniales et le nationalisme panarabe. Car, sur le plan génétique, les Algériens, dans leur grande majorité, sont avant tout d’origine berbère et leur lien avec la péninsule arabique ou le Moyen-Orient est surtout linguistique et religieux. Sur le plan ethnique, l’Algérie, comme le reste du Maghreb central, a d’abord été habitée par une population berbère autochtone, laquelle a subi une multitude d’invasions porteuses, à chaque fois, de nouveaux apports démographiques. Phéniciens, Grecs, Romains puis Vandales, Byzantins, Arabes, Turcs et Français se sont succédé au fil des siècles mais c’est la conquête musulmane, à partir du milieu du VII e siècle de notre ère, qui a façonné de manière durable l’identité de la population. Contrairement à une idée reçue, cet apport démographique en provenance d’Orient a été modeste. 

Les cavaliers de l’islam sont arrivés seuls, sans femmes et enfants, et nombre d’entre eux ont fait souche sur place. D’ailleurs, ce sont surtout des tribus berbères islamisées qui ont constitué le fer-de-lance de la conquête musulmane de la péninsule ibérique. 

La seule invasion de grande ampleur au Maghreb sur le plan démographique est celle de la confédération tribale des Banu Hilal venue des confins de l’Arabie au XI e siècle. Combattues par les Berbères, ces tribus ont fini par être défaites et reléguées dans les confins de l’Ouest maghrébin. 

Des enquêtes génétiques effectuées depuis quelques années, et dont les résultats ont été repris par la presse algérienne, démontrent que 65 à 75 % de la population est berbère même si la proportion des berbérophones est moins importante (30 à 40 % de la population). Cette différence n’a rien d’étonnant car, au fil des siècles, de nombreuses tribus berbères ont adopté la langue du Coran. Dès lors, la dualité habituelle qui oppose Arabes et Berbères en Algérie n’est pas pertinente. Au lieu de cela, il est plus indiqué de parler de berbérophones et d’arabophones. 

Une autre manière de définir les Algériens serait de parler de berbéro-arabes. Dans les faits, l’identité berbère des Algériens continue toutefois de faire débat, de nombreux arabophones ayant du mal à assumer cet héritage. Sacralisée, assimilée au combat anticolonial, l’identité arabe, encore une fois indéniable ne serait-ce que sur les plans religieux et culturels, fait figure de totem ou de dogme. Ses partisans insistent sur le lien ethnique qui les unirait avec les autres peuples arabes tandis que ses détracteurs exigent que le caractère berbère de l’Algérie et des Algériens soit reconnu sans aucune ambiguïté. 

Les études montrent, par ailleurs, que 15 à 20 % de la population ont des origines proche-orientales, le reste des Algériens (10 %) ayant des liens génétiques avec l’Europe de l’Ouest et la Turquie.

Akram Belkaid

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